1-Constat en matière de diversité en politique québécoise
Nul doute que du point de vue de la représentation politique, le Québec a encore beaucoup d’efforts à déployer pour opérer le virage d’une société ethnocratique vers une société pluraliste, reflétant sa diversité démographique (diversité que la classe politique cherche à balayer sous le tapis, de manière à ne pas effrayer l’électorat blanc traditionnel).
2- La Mairie de Montréal: un gros zéro
La plus récente démonstration d’une « javellisation » de la représentation politique nous est servie par la Mairesse de Montréal, fraichement élue d’ailleurs, Valérie Plante, lors de la présentation de son cabinet exécutif (entendez, son gouvernement municipal), le 19 novembre dernier. Un gouvernement municipal, égalitaire du point de vue du genre (c’était une promesse électorale); mais un cabinet complètement caucasien, exclusivement blanc (aucun politicien issu d’une communauté ethnoculturelle ou racisée).
Cela est d’autant plus insultant et indignant que Montréal est une ville cosmopolite de près de 2 millions d’habitants, démographiquement diversifiée et bigarrée. Le cabinet de Valérie Plante reflète un Montréal passéiste et nostalgique des années 50, quand la population était exclusivement blanche, comme les flocons de neige à Noël.
Pour vous donner un ordre de grandeur, selon une étude publiée en 2013 par Perspective Grand Montréal, 25% de la population montréalaise est née à l’étranger; la proportion pourrait s’élever à une personne sur 3, c’est-à-dire, 33 % d’ici à 2031. Au regard de ces données démographiques, Madame Plante fait montre d’un manque flagrant de flair politique en ignorant 25% de ses électeurs (on ne bat pas la démographie en politique); à moins que son choix traduise une résolution ethnocentriste blanche.
Vous me direz que le parti politique de Madame Plante, Projet Montréal, n’a fait élire aucun candidat issu des communautés ethnoculturelles. Foutaise! « La politique, c’est l’art du possible ». En tant que Premier Édile de Montréal, Valérie Plante aurait pu—que dis-je, elle aurait dû!— convaincre (c’est son privilège et son devoir) les élus des autres partis de se joindre à son cabinet, question de prouver sa sensibilité à la question de la diversité démographique et ethnoculturelle de la 2e plus grande ville du Canada. Il s’avère qu’en matière de diversité en politique, Madame Plante mérite un gros zéro. Honte à elle!
3- Leçons à tirer
En matière de droits politiques, les communautés ethnoculturelles ne doivent pas attendre qu’on leur fasse des dons ou des faveurs; elles doivent prendre ce qui leur revient. Pour y arriver, nous devons tirer des leçons de la petite poignée des politiciens et politiciennes issus des communautés culturelles et racisées. À ce compte, il y en a 4 types:
3.a- Le figurant
Il y a des politiciens dont le seul mérite consiste à dire qu’ils sont élus. Une fois élus, ils oublient leurs racines. Ils sont sans couleur. Sans odeur. Sans saveur. Ce type de politicien ne porte aucune cause qui fasse avancer sa communauté. Son seul souci est de se fondre dans la classe politique traditionnelle. De tels politiciens ne se préoccupent pas de bilans, ni de réalisations. Leur seul souci est de se faire réélire. Quiz: quel nom vous vient spontanément à l’esprit ?
3.b-Le Token Black
Ce type de politicien est celui que le système utilise ou qui se laisse utiliser par le système pour fermer la gueule à ses frères et soeurs de sang ou de race. Ce sont généralement des politiciens que l’on nomme à des postes prestigieux pour pouvoir dire que le système n’est pas raciste et qu’il laisse la place aux autres. Grâce à eux, ou à cause d’eux, on hésite à dire que le système n’est pas diversifié. Au contraire, à chaque fois qu’on parle de racisme systémique, on cite leur nom (on connait les limites du name-dropping en matière de hétorique) pour nous faire taire.
Mais, en matière de politique publique, quel est le bilan de ces politiciens pour e progrès de leur communauté d’origine? Que nenni! Quels sont leurs hauts faits d’armes pour la communauté de laquelle ils sont issus. Aucun. Ce sont des politiciens qui sont en politique pour faire avancer leur propre carrière et lécher leur propre image. À cause d’eux, on ne peut plus dire que le Canada ou le Québec ne fait pas de place en politique aux communautés culturelles. Le système nous cite leur nom comme un épouvantail. À ceci je réponds, si on peut les compter, c’est qu’il n’y en a pas assez.
À cet égard, à qui pensez-vous?
3.c-Le nègre de service
Ce type de politicien est celui qu’on utilise contre sa communauté d’origine. C’est à lui ou à elle qu’on confie les pilules amères pour qu’il les administre à ses frères et soeurs de race. C’est aussi celui dont le comportement rappelle celui du commandeur sur la plantation de coton ou de la canne-à-sucre ou du café. Tout esclave fût-il, le maître esclavagiste lui plaçait un bâton en main, pour qu’il bastonne ses frères et ses soeurs. Ce politicien agit comme un insensé qui pratique la politique de la terre brûlée, qui fout le feu sur le pont sur lequel il va devoir passer dans 4 ou 5 ans. À qui pensez-vous? …..Ah bon!
3.d- Le politicien porteur de causes
Ce type de politicien est plus rare. Il n’entre pas en politique pour avoir « une job ». Il y entre pour une cause. Il la porte à bout de bras, quitte à s’aliéner ses collègues du parti. Il constate que sa communauté est aux prises avec telle problématique, il entre dans la lice pour changer les choses en faveur des siens. Ce politicien est rarissime. Il nous faut en produire plus pour changer la situation socio-économique de nos communautés ethnoculturelles. Comment y arriver? À cet égard, je vous soumets deux propositions:
3.1-Évitons la pratique des électrons libres
L’expérience des dernières années nous apprend que quand un candidat d’une communauté ethnoculturelle cogne lui-même à la porte d’un parti politique ou quand c’est le parti politique qui le recrute en électron libre, très rapidement, le système le casse et le transforme en l’un ou l’autre des trois types de politiciens précités( le figurant, le token black ou le nègre de service). Pour corriger ce travers, ce sont les organisations des communautés ethnoculturelles qui doivent proposer des candidats aux partis. Ainsi, nos élus seront redevables d’abord à leur communauté d’origine.
3.2- Structurons nos communautés en organisations politiques
Si nous voulons combattre la sous-représentativité des communautés ethnoculturelles en politique, il est impératif de mettre sur pied des organisations politiques au sein de nos communautés. Si nous sommes organisés, nous forcerons les partis politiques à tenir compte de nos choix dans les comtés ou circonscriptions où nous sommes numériquement forts ou majoritaires. Si nous sommes organisés et unis, les partis politiques devront tenir compte de nos choix. En politique, on ne bat pas la démographie.
En guise de conclusion
À moins de 10 mois des prochaines élections provinciales, et à moins de 2 ans des prochaines élections fédérales, qu’il me soit permis de reproduire les 3 conseils de Mao Zedong: Organisation. Organisation. Organisation.
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